Derrière chaque grand homme, il y a une femme, dit le proverbe bien connu. On peut également dire sans craindre de se tromper que derrière chaque grand champion, il y a un entraîneur.
Lucian Bute, Arturo Gatti et Georges St-Pierre. Trois grands champions. Trois grands champions qui ont fait en sorte que les noms de Stéphane Larouche, Buddy McGirt et Freddie Roach disent plus que seulement quelque chose aux amateurs de boxe et d’arts martiaux mixtes.
Et si Jean Pascal peut maintenant se targuer de faire partie des meilleurs boxeurs livre pour livre de la planète depuis sa victoire sur Chad Dawson, il n’a pas à s’interroger longuement afin de savoir pourquoi il en est ainsi.
« Jean a vraiment livré sa meilleure prestation lors du combat le plus difficile depuis le début de sa carrière », a indiqué son entraîneur Marc Ramsay lors d’un entretien téléphonique avec le RDS.ca. « Mais comme c’était le cas lorsqu’il évoluait dans les rangs amateurs, Jean est quelqu’un qui aime relever des défis. »
« Plus l’enjeu est important, plus son niveau d’attention est élevé. Ç’a définitivement été l’affrontement où Jean a le plus suivi la stratégie, où il a été le plus concentré sur ce qu’il avait à faire. »
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Puisque l’association entre les deux hommes remonte à plusieurs années déjà, Ramsay connaît mieux que quiconque son protégé et c’est pourquoi absolument aucun détail n’a été négligé en préparation de la rencontre au sommet contre Dawson, qui était considéré jusque-là comme le sixième meilleur boxeur livre pour livre au monde selon le très réputé Ring Magazine.
Pascal et Ramsay ont quitté le Québec pendant quelques semaines pour passer un nombre incalculable d’heures en Floride, en République dominicaine et même en altitude en Colombie afin que le champion conserve sa ceinture des mi-lourds du WBC.
« Contrairement à un boxeur comme Antonin Décarie qui a besoin de rester près de sa famille et qui peut le faire, car il est très ordonné dans sa vie sociale, Jean doit aller s’entraîner ailleurs », explique Ramsay. « Il est tellement sollicité que ce serait extrêmement difficile de travailler de manière optimale. »
« C’était nécessaire et Jean le savait. Dans le fond, il n’a fait que suivre nos recommandations. »
Et c’est exactement ce qui différencie le Pascal de décembre 2008 qui venait de subir sa première défaite aux mains de Carl Froch et pour qui l’avenir ne s’annonçait pas nécessairement rose à celui qui n’a plus à se soucier de son avenir grâce au million de dollars qu’il a empoché pour son duel contre Dawson.
« Jean a toujours été très talentueux, sauf qu’il avait pratiquement toujours roulé là-dessus depuis le commencement de sa carrière », avoue Ramsay. « Nous n’avions jamais de difficulté à le pousser à l’entraînement, mais il était plutôt nonchalant du côté de la stratégie. »
« Mais Jean a compris que s’il voulait gagner à ce niveau-là, il n’avait pas le choix de commencer à travailler en équipe. Ce principe vaut pour tout le monde, tant pour le boxeur que pour l’entraîneur. Ça devient à partir de ce moment-là tellement plus agréable pour tout le monde! »
Bousculer les habitudes
Si certains entraîneurs – tous sports confondus – vivent et meurent avec leur plan de match, d’autres n’ont pas forcément de tactique coulée dans le béton. Ils préfèrent plutôt se préparer à toutes éventualités afin d’être en mesure de réagir le plus efficacement possible.
« Il ne faut pas oublier qu’un boxeur se bat contre adversaire qui a des réactions, qui est vivant », mentionne Ramsay. « Il faut que notre stratégie soit flexible. »
Ainsi, deux grands principes ont régi les actions de Pascal pendant son combat face à Dawson. Mettre de la pression si ce dernier se faisait plus timide ou encore battre en retraite s’il se montrait au contraire plus agressif. Finalement, tout ce qui avait été appréhendé est arrivé.
« Jean devait être très dominant lors des trois premiers rounds pour dicter le rythme de l’affrontement », poursuit Ramsay. « Il fallait également réveiller les juges en raison du statut de Dawson aux États-Unis. »
La réputation de l’ancien champion des mi-lourds du WBC était d’ailleurs la plus grande crainte du clan Pascal. On craignait que les assauts chaudement disputés lui soient automatiquement donnés en raison de la notoriété dont il jouit au sud de la frontière.
« Nous voulions mettre les choses au clair dès le début », précise Ramsay. « Et puisque nous savions que Dawson est du genre à se mettre sur le pilote automatique plus le duel avance, c’était la stratégie à observer pour le faire sortir de sa zone de confort. »
Une solide réputation
C’est évidemment beaucoup plus facile à prétendre une fois les événements terminés, mais comment le clan Dawson a-t-il pu autant sous-estimer une bande de Québécois qui n’en étaient pourtant pas à leur première expérience à un si haut niveau?
« Nous prenions connaissance de leurs déclarations pendant que étions en Colombie et ça nous motivait beaucoup », confie Ramsay. « C’est une façon typiquement américaine de faire les choses dans le monde de la boxe, de ne pas regarder ce qui se fait ailleurs. »
Pourtant, le nom de Ramsay résonnait déjà aux quatre coins de la planète. Ses services sont réclamés par de nombreux pugilistes, qui souhaitent suivre les traces des Bute et des Pascal.
« Le modèle québécois n’est pas encore établi, mais de nombreux jeunes s’intéressent à ce que nous faisons », ajoute Ramsay. « Je travaille déjà avec des boxeurs étrangers, dont le poids lourd cubain Odlanier Solis, le seul qui peut aspirer aux titres des Klitschko. »
« Nous formons une bonne petite équipe avec notamment Pedro Diaz et je suis convaincu que nous entendrons davantage parler de nous sous peu. »
Le travail de Ramsay n’est peut-être pas encore reconnu à sa juste valeur comme l’a déclaré le coloré Russ Anber après la victoire de Pascal, mais gageons que la situation risque de rapidement changer.
rds.ca